14 mars 2010
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Ceci n'est pas une feuille.
Ceci n'est pas un arbre.
Ceci n'est pas un tableau de Magritte.
Ceci est ce qui nous reste d'une pensée de Magritte.

Il a été beaucoup écrit de ce personnage qui prenait le contre-pied de toutes les règles. On a pu dire que ce banlieusard ordinaire, aussi terne et gris que les quartiers où il vivait, était un masque au sens vénitien du terme.
Attentats poétiques, questionnants
d'un insolent au monde.
Cet Arbre-feuille, debout au soleil bleu, que je place toujours en tête de mes articles sur la décroissance parce qu'il m'évoque des temps futurs aux fruits étranges, Magritte serait-il heureux que je vous en parle en ces termes ?
Non. Mille fois non, car à l'instar de Debussy qui n'indiquait aucune nuance précise, sachant coléreusement qu'elles seraient toujours détournées, Magritte se rebiffait sans cesse contre la volonté de donner du sens à ce qui pour lui " N'existe qu'en dehors de ce que l'on sait à son sujet. "
Attentats poétiques, questionnants
d'un insolent au monde.
Cet Arbre-feuille, debout au soleil bleu, que je place toujours en tête de mes articles sur la décroissance parce qu'il m'évoque des temps futurs aux fruits étranges, Magritte serait-il heureux que je vous en parle en ces termes ?
Non. Mille fois non, car à l'instar de Debussy qui n'indiquait aucune nuance précise, sachant coléreusement qu'elles seraient toujours détournées, Magritte se rebiffait sans cesse contre la volonté de donner du sens à ce qui pour lui " N'existe qu'en dehors de ce que l'on sait à son sujet. "

Est-ce le suicide de sa mère alors qu'il est enfant qui a fait de lui ce peintre sans cesse s'échappant,
peut-être déjà rêvant
de bateaux qui sont d'air et d'eau ?
Toujours est-il qu'un jour, alors qu'il remonte d'un caveau en compagnie d'une camarade d'innocents jeux amoureux, il croise au coin du cimetière un peintre occupé à recopier les tombeaux en ruine. Proximité équivoque de la mort si familière déjà et de l'amour en naissance. Première rencontre avec la peinture sous ces doubles et troublants auspices. Le non sens imposé par la vie et les sens balbutiants.
peut-être déjà rêvant
de bateaux qui sont d'air et d'eau ?
Toujours est-il qu'un jour, alors qu'il remonte d'un caveau en compagnie d'une camarade d'innocents jeux amoureux, il croise au coin du cimetière un peintre occupé à recopier les tombeaux en ruine. Proximité équivoque de la mort si familière déjà et de l'amour en naissance. Première rencontre avec la peinture sous ces doubles et troublants auspices. Le non sens imposé par la vie et les sens balbutiants.

Ce vieil homme dont la cage thoracique contient deux oiseaux, n'y voyez surtout rien d'autre que ce qu'il est: l'homme à la cage thoracique ouverte sur des oiseaux, votre voisin peut-être que vous ne savez voir. C'est au peintre de soulever le manteau qui recouvre l'invisible, d'offrir au regard de quoi " Entendre le silence du monde ".
Magritte souffrait intimement du triple vacarme qui surgit des choses évidentes et visibles, du sens qu'on leur adjuge et de l'utilité qu'on leur prête.
Voir, était pour lui tout simplement voir sans vouloir voir autre chose que ce que l'on voit. Voir, c'était abandonner l'usage qui veut qu'à un objet corresponde un mot, une idée, une émotion analysable.
Voir, c'est s'abandonner. Et peindre, donner à voir la pensée.

L'œuvre de Magritte ne copie pas le monde tel qu'il se présente, elle n'invente pas un non plus un univers totalement inédit. Elle donne à voir ce qui est caché derrière les vieux habits du quotidien.
Le monde tel que la pensée l'organise, est fait de lignes de ruptures.
Mais qui dit que la Nature est discontinue, si ce n'est l'orgueil éphémère de la pensée humaine? Si l'oiseau est envahi de nuages, c'est que l'oiseau est aussi le ciel.
Et comment illustrer ces toiles merveilleusement provocatrices, subversives même dans leur étrangeté, autrement qu'en composant , en écho, un poème?
Lorsque nous regardons la toile qui précède, ses cubes d'atmosphère ne nous nous disent-ils pas que justement, s'il est un objet familier qui échappe à toute tentative de mesure volumétrique, parce que sa mesure est d'une autre nature, c'est bien le ciel ?
Mon tableau préféré est sans nul doute celui qui suit:
Le monde tel que la pensée l'organise, est fait de lignes de ruptures.
Mais qui dit que la Nature est discontinue, si ce n'est l'orgueil éphémère de la pensée humaine? Si l'oiseau est envahi de nuages, c'est que l'oiseau est aussi le ciel.
Et comment illustrer ces toiles merveilleusement provocatrices, subversives même dans leur étrangeté, autrement qu'en composant , en écho, un poème?
Lorsque nous regardons la toile qui précède, ses cubes d'atmosphère ne nous nous disent-ils pas que justement, s'il est un objet familier qui échappe à toute tentative de mesure volumétrique, parce que sa mesure est d'une autre nature, c'est bien le ciel ?
Mon tableau préféré est sans nul doute celui qui suit:

Par sa facture pointilliste il m'évoquerait assez Seurat. La douceur des nuances, l'élégance des lignes, un léger rappel un peu maniériste de certain art de la renaissance.
Mais ce qui me chavire, ici, ce sont les paradoxes qui tordent le regard, " distendent " la pensée pour reprendre un mot de Breton.
Le titre en est " Blanc-seing " . Cette cavalère et sa monture qui traversent la forêt nous y révêlent ce qui y est visible et caché, y compris de leur propre substance. Il y a là tout un jeu rythmique sur l'apparition-disparition / premier plan-lointain / transparence visible - montré invisible. Si le regard accepte de suivre les limites que dessinent les troncs d'arbres ou l'encolure de la bête, alors il voit cette scène bouger. Mieux, il découvre que c'est ce qui est caché qui montre. C'est l'abre très fin à gauche de la cavalière et en arrière plan qui permet de constater le tronc plus large en premier plan. C'est un tronc que notre langage ordinaire dirait " invisible " mais qui est en réalité un tronc " pensé " qui nous dévoile le feuillage et le cheval .
Laissons parler Magritte:
" Des choses visibles peuvent être invisibles. Lorsque quelqu'un passe dans une forêt, d'abord vous els vopyez, puis vous ne les voyez plus, mais vous savez qu'ils sont là. Dans ce tableau, la cavalière cachent les arbres et les arbres cachent la cavalière. Mais notre pensée englobe le visible aussi bien que l'invisible. J'utilise la peinture pour rendre visible la pensée."
Le tableau qui suit m'est cher également. Ce cavalier perdu entre des arbres feuilles, que fuit-il qui ressemble au poudroiement d'un feu plutôt que d'un automne?
Mais ce qui me chavire, ici, ce sont les paradoxes qui tordent le regard, " distendent " la pensée pour reprendre un mot de Breton.
Le titre en est " Blanc-seing " . Cette cavalère et sa monture qui traversent la forêt nous y révêlent ce qui y est visible et caché, y compris de leur propre substance. Il y a là tout un jeu rythmique sur l'apparition-disparition / premier plan-lointain / transparence visible - montré invisible. Si le regard accepte de suivre les limites que dessinent les troncs d'arbres ou l'encolure de la bête, alors il voit cette scène bouger. Mieux, il découvre que c'est ce qui est caché qui montre. C'est l'abre très fin à gauche de la cavalière et en arrière plan qui permet de constater le tronc plus large en premier plan. C'est un tronc que notre langage ordinaire dirait " invisible " mais qui est en réalité un tronc " pensé " qui nous dévoile le feuillage et le cheval .
Laissons parler Magritte:
" Des choses visibles peuvent être invisibles. Lorsque quelqu'un passe dans une forêt, d'abord vous els vopyez, puis vous ne les voyez plus, mais vous savez qu'ils sont là. Dans ce tableau, la cavalière cachent les arbres et les arbres cachent la cavalière. Mais notre pensée englobe le visible aussi bien que l'invisible. J'utilise la peinture pour rendre visible la pensée."
Le tableau qui suit m'est cher également. Ce cavalier perdu entre des arbres feuilles, que fuit-il qui ressemble au poudroiement d'un feu plutôt que d'un automne?

J'ai envie ici de vous laisser sur ce merveilleux tableau
dans lequel l'esprit voyage et se perd.
Et de laisser de l'ombre sur la page
dans laquelle vous continuerez de voir les étoiles
qui s'y cachent. Ou les pièges.
dans lequel l'esprit voyage et se perd.
Et de laisser de l'ombre sur la page
dans laquelle vous continuerez de voir les étoiles
qui s'y cachent. Ou les pièges.
