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Eaux et palais de l'Alhambra de Grenade


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Grenade. Un nid de braises sèches en haut de la colline, un chemin de terre bordé de parfums qui s’ouvrent au rythme de la promenade montant en grappes des ravins si proches.
Al Hamra, la rouge, comment dire l’amour que j’éprouve pour toi si ce n’est en le comparant à celui que je ressens en pensant à une autre citadelle, celle des Dogon ?

Tout a été dit, écrit chanté tellement mieux. En rajouter serait comme une offense.
Plus que tout  partager l’émotion indicible que fait naître ce palais visité vingt fois dans mon existence sans jamais me lasser.

Quand on arrive à l’Alhambra, la première chose qui atteint est cette débauche de parfums dont on croirait qu’ils ont attendu notre passage pour s’offrir. On se sent presque criminel de boire ainsi les sucs volatiles. La vérité est que les espèces florales furent choisies pour s'ouvrir heure par heure du matin jusqu'au soir, selon un ordre de promenade à la fois fantaisiste et rigoureux. Quel que soit le chemin emprunté, il faut bien trois heures pour parcourir ces allées. Les parfums à l'aller et au retour ne seront pas les mêmes...

Hésitation. Tant de voies s'offrent au pas. Nous empruntons toujours celui qui longe l'histoire et nous fait remonter des sévères casernes jusqu'aux palais délicats où bruissent les casacades. Ici le chemin de ronde et sur la droite, le monstrueux palais de Carlos Quinto, une verrue en ces lieux.

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Il se raconte qu'une princesse Arabe tomba amoureuse d'un chevalier Chrétien. Elle fut enfermée dans la célèbre tour de la Captive qui fait partie d'une chaîne de trente tours défensives ceinturant la Kasba. La plupart furent utilisées par les armées de Napoléon et laissées en triste état, en cours de restauration pas toujours heureuse.

Les lignes pures, massives, courageuses, de cette coursive de pierre, encadrent ce qui reste de la vieille ville.

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Entrer dans les palais de l'Alhambra c'est rejoindre un monde hors du temps où toute chose comble sans jamais assouvir. Où l'absence est appel de la vie.

Ici, bien sûr, la célèbre cour des Lions d'une légèreté diaphane et dont on remercie je ne sais quel Dieu que la barbarie des invasions Napoléoniennes l'aient conservée intacte.

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Que de calme que de paix dans ces lieux où le silence s'impose sans même que les guides les jours de grande fréquentation touristique aient à le suggérer. l'équilibre des colonnes, la légèreté des sculptures de stuc répétées à l'envi comme on pourrait caresser pour l'éternité, la douceur des couleurs, l'harmonie subtile entre pierre, eau et feuillage, tout concourt à la beauté et la réconciliation avec soi. On ne pourra plus oublier...

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Ici la salle des deux soeurs. Mille légendes mais une vérité: deux dalles jumelles qui se répondent dans cette partie du palais réservée à la Sultane:



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Le raffinement inouï de ces lieux tient aussi à la lumière qui tombe des plafonds . C'est comme si les rayons du jour rebondissaient sur les caissons de stuc et d'or qui décorent chaque pièce du haut en bas.

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De cette fenêtre on raconte qu'était tombé le fils aîné du Calife et que de désespoir, la dame de compagnie qui était chargée de sa surveillance préféra se jeter dans le ravin en dessous que subir la décapitation annoncée.

La Chambre dorée

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et son patio, ici vu de nuit

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faisaient jonction entre le palais de vie et le palais plus juridictionnel, ou Mexuar.
La résidence du calife était entourée de jardins de myrtes et c'est encore aujourd'hui une blessure que d'imaginer les parfums qui habillent ce palais de rêve où l'on ne fera que passer. Sous ces arches de verdure qui ponctuent le chemin vers le Generalife se nichent souvent des bancs où l'on peut tenir à deux, assis, en vis à vis d'un autre banc, ou seul pour méditer. Mais d'où vient-il, ce vert qui rampe la montagne?

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Le Generalife a des origines très controversées: cadeau du calife à son architecte ou plus vraisemblablement palais d'été, abreuvé des eaux de la Sierra Nevada qui étale au loin ses cimes enneigées. C'est un paradis de fraîcheur qui monte et descend sur la colline, un modèle d'économie aussi car ces eaux qui jaillissent en permanence coulent en circuit fermé, par un système de siphon.
Ici l'escalier d'eau, très élaboré, il en est de plus rudimentaires, faits de troncs évidés dans lesquels coule une eau presque glacée. Voici la face cachée de ces rampes d'eau:

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Et leur aboutissement:

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Les appartements sont construits sur plusieurs étages, de courts escaliers sans fatigue et sans que jamais le regard soit encombré du bâti. Partout dans le jardin des alcoves amoureuses et discrètes, dont le parfum tait encore celui des flirts novices.

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Tout se fond à la verdure, merveilleusement, et il faut presque violer les frondaisons et buissons pour découvrir soudain l'enchantement d'un plan d'eau ou d'une maison Mauresque, ici le patio du Canal:


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La simplicité de ces lieux de vie contraste avec l'extrême décoration du palais officiel. Ici la Tour des dames, dont les peintures du XIII ème siècle sont uniques dans toute l'histoire arabo musulmane puisqu'elles représentent des êtres humains ou animaux, scènes de chasse, de guerre ou d'amour:

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Visitant les chambres très rustiques, toutes de blanc décorées et dont certaines fenêtres sont encore fermées par des moucharabieh, on peut se pencher sur les jardins odorants où des fantômes veillent dont on sent la présence ténue:


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C'est en montant encore un peu que l'on va découvrir les palais dans toute leur splendeur, cette harmonie de l'ocre et de la verdure qui conjurent le temps, l'équilibre parfait des formes, des distances, des altitudes:

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Quittant enfin ce paradis sur terre qu'est ce chateau
Andalou, ainsi conçu par le maître jardinier qui voulait honorer l'idée que l'eau coulerait sans se perdre ni s'interrompre, nous nous arrêterons devant une pierre gravée de ces mots du poète Francisco de Icaza:

Fais-lui l'aumône, ô femme,
Car il n'y a plus grande peine
Que d'être aveugle à Grenade.


Une galerie de photos proposée par Arte






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L
J'ai craint un moment que ce fil de voyage ait disparu de ton blog<br /> je l'avais parcouru ce matin je ne retrouvais plus sa présence lumineuse et l'invitation qu'il propose à se promener autant au dehors qu'au dedans de soi même<br /> en ce fruit éclaté et pourtant si un<br /> qu'est la grenade.<br /> ...<br /> oui<br /> nid de braises <br /> sèches <br /> et pourtant gorgées de jus
Répondre
R
<br /> merci...<br /> <br /> <br />
C
Je suis revenue voir le palais. IL est magique. <br /> Clémentine
Répondre
R
C'est un des endroits au monde où je voudrais terminer ma vie, on n'épuise pas la beauté de ces lieux là...