Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique

Musique, peinture, poésie, penser... * 1 * La préhistoire


Pendant plus de trente ans j’ai enseigné le piano et ce que l’on nomme aujourd’hui la formation musicale, qui regroupe l’ancien et si rébarbatif ( paraît-il ?) solfège mais également l’histoire de la musique, le chant choral, l’analyse et l’écoute du répertoire.
Pour ce qui est de la lecture de notes, du rythme, du travail de l’oreille à travers les dictées, l’apprentissage du chant et l’analyse d’œuvres, la parution de la méthode de Jean-Marc Allerme fut une révolution.

Mais il me manquait dans tout ce qui existait de cahiers et leçons dans le commerce le petit plus documentaire qui fait se rejoindre les arts et les langages, se rencontrer la peinture, la musique, la poésie et pourquoi pas, la philosophie, ouvre la curiosité, donne le goût des multiples expressions de la créativité humaine.

Comme tous les enseignants du monde j’ai donc fait ma petite cuisine à partir des méthodes existantes.
Mes cours réunissaient au grand maximum dix élèves. Chaque semaine un  contrôle écrit permettait à chacun de se situer, repérer ses acquis ou ses failles. Beaucoup de temps était consacré à relier les arts entre eux selon une époque ou une école donnée, souvent en lisant un court extrait d'une oeuvre, un poème, une réflexion philosophique, en regardant l'oeuvre d'un peintre sur une encyclopédie, en écoutant la musique de l'époque concernée.
C’est le fruit de ces années de travail que je vais mettre peu à peu sur ce blog.

Bien sûr nous ne manquions d'évoquer l’élaboration du langage articulé : le premier instrument n’est-il pas la voix que toute mère chantonne en berçant son bébé, avec laquelle le chasseur appelle ou alerte les siens et ce depuis environ  2 millions d'années nous disent les spécialistes du langage ?


Les instruments « de musique » les plus anciens qui aient été retrouvés ont été datés de 100 000 ans avant notre ère et sont davantage des instruments avertisseurs, comme les sifflets en phalanges de renne.

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Il est avéré que dans un premier temps, l’homme préhistorique récupérait les phalanges d’animaux tués par de grands carnassiers dont la puissante mâchoire, se calant très précisément sur certaines phalanges, avait troué les os. Il ne lui restait plus qu’à vider le petit os de sa moelle puis éventuellement agrandir et régulariser le trou.

Récemment en Finlande, on a soumis des troupeaux de rennes sauvages à  l’écoute de sons émis sur un sifflet indien du début du siècle. Très curieusement, les animaux ont semblé apaisés par ces sonorités et se sont spontanément couchés sur la neige, ce qui donne à penser que l’instrument était utilisé à des fins de chasse ou surveillance des troupeaux.

On va retrouver dans la période qui va suivre et en divers lieux d’habitat ( Dordogne, Aveyron, Afrique, Australie etc) des rhombes, instruments dont la sonorité envoûtante, profonde, effrayante parfois, témoigne encore aujourd’hui de la présence des ancêtres, leur voix vivante autour des vivants.
En forme de poisson plat, en pierre, en os, en bois, en terre cuite, le rhombe est attaché à un tendon, une liane ou une ficelle et mis en rotation. Le ronflement change de tonalité en fonction de la vitesse du mouvement de rotation.

rhombe-aust.jpg


 Puis vinrent racloirs, flûtes à deux, trois voire cinq trous en os, cornes d’animaux, tambours et de là une quête à chaque fois plus inventive d’imiter les sons de la nature ou d’en créer d’autres.

Que pensait l’homme préhistorique ? Il ne nous reste aucune trace de ses questionnements si ce n'est ses merveilleuses fresques. Deux d'entre elles, situées au Tassili.

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Mais même d’une manière fruste il ne devait pas échapper, le soir, regardant le ciel et lorsque la bataille pour survivre le laissait un peu respirer, aux questions vertigineuses que soulevait Pascal.
Comme le philosophe, comme nous chacun  à notre façon, se disait-il :

Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie.

***
Il est difficile de trouver sur la toile des enregistrements de ces premiers outils sonores et c'est vraiment regrettable que les départements d'ethnomusicologie des grands Musées ne se dotent pas des moyens de faire revivre pour nous - et mettre en ligne - le son de ces premiers instruments d'Homo Musicalis, auxquels seuls actuellement les spécialistes peuvent accéder. Je vous offre donc un enregistrement d’un instrument à vent qui date des débuts de l’humanité, quoique toujours utilisé en Papouasie, Nouvelle-zélande, Australie


Et de percussions, ici le plat de la main tape sur le tambour d'une eau courante
 






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J
Bienvenue dans la communauté "pensées d'ailleurs".
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R
Merci, vous ne le regretterez pas (sourire)je peux être très... créative si stimulée
L
Je m'abonne de suite à cette sérieet j'essaierai d'y entraîner Henry (auquel je suis certain ce ton parlera)Sinon, j'adore le Deejiridooet ses sonorités de matière fluide
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R
C'est sympa et super encourageant,cela va être une série longue car mes classeurs sont emplis de trente années de pratiquemais j'ai envie de poser cela...Le deedjiridoo est un magnifique instrument, qui peut atteintre des longueurs extraordinairessouvent très bellement ornementéet qui réclame une technique de souffle très particulièrece que l'on nomme la respiration continueelle permet au musicien de souffler pendant des heures sans reprendre apparemment sa respiration en fait, il stocke des réserves un peu comme un hamster dans ses joues.J'en parlerai à un moment ou un autre. merci de la visite Luc.
V
Comme tu es passionnante !  Tes élèves doivent être sous le charme... Bravo pour ce nouveau volet ouvert sur ce blog."Le silence éternel des espaces infinis m'effraie", disait Pascal. Oui, mais "le silence qui précède la musique est déjà de la musique", disait Mozart. Car la musique préexiste à l'homme, il l'a découverte en entendant les oiseaux, et le chant du vent dans les arbres, le bruit des flots sur le rivage.
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R
Les élèves étaient... car j'ai arrêté l'an dernier pour me consacrer à ma mère.Sinon, tu dis vrai, la musique de la mer, du vent dans les feuillescomme cela a dû peser dans l'imaginaire des humainsavant qu'ils ne se décident à créer leur propres musiquecar tout de même, s'il est un art qui échappe à l'imitation, c'est bien celui ci.Et c'est un mystère, cette musqiue qui sort d'un cerveau humain,un  immense mystère.
M
intéressant !<br /> que n'as pas tu fais ? :-)<br /> bonnes fêtes de fin d'année !<br /> bien à toi Marco
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R
Oh tu sais, si on résumeprofesseur de piano et de formation musicale pendant 30 ansaccompagnante en soins palliatifs pendant quinzeengagée politiquement toute ma vieune vieille histoire d'amour avec l'Afrique et beaucoup de voyagesmaman de je ne sais combien d'associations dont un orchestre symphonique régional...Oui, c'est vrai (sourire) cela fait beaucoup, une vie bien remplieet je ne compte pas les hobbies (  peinture, poterie, cuisine, philo... et écriture) oui une vie belle et riche. Bisous marco et de bonnes fêtes à toi aussi!
M
Etonnant, le Deedjiridoo !! J'aime aussi ce ruissellement sur les voix enfantines chez les Pygmées. On se sent proche de la nature grâce à toi aujourd'hui !Merci de contribuer à éduquer notre écoute. Chanceux que nous sommes ici de pouvoir bénéficié de ton enseignement ! Vraiment chanceux !Bonne soirée.Bises
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R
Nous en avons un  quelque part dans la maison, et aussi des instruments africains tous plus charmants les un s que les autres, mais le deedjiridoo est très aprticulier, car c'est la voix( et non le souffle seul) qui crée à travers ce tuyau les modulations étranges...Bises Marianne à toi aussi;