Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique
Par Viviane Lamarlère
C’est période de recensement et on ne déroge pas aux ordres des autorités.
Saveria et Santu attendent un heureux événement, tout proche. Et en ces semaines de l'Avent, la perspective de devoir rejoindre la ville dont ils dépendent pour une formalité qui les dépasse ne les réjouit guère mais le garde champêtre sait se faire obéir dans ces villages perdus de Corse.
D’une halte à l’autre, dans la crainte que cette naissance ne survienne plus tôt que prévu, Saveria va tenter de cacher à son époux ce qui l'étreint. La campagne est belle, odorante, les repas simples qui les attendent sont des festins qui rassasient autant le corps que l’âme et trompent leur inquiétude.
L’arrivée à la ville est l’occasion d’autres émotions tout aussi intenses qu’Angèle Paoli nous offre de sa plume à la fois lyrique, amoureuse de sa terre, et toute en petites touches.
Le détail est fouillé, on y sent la présence à ce qui fait notre histoire commune, les vieux outils, les odeurs des bêtes, les appentis où nous jouions enfants. Mais aussi une formidable écoute de l'humain agacé, de l'humain angoissé, de l'humain confiant.
Jamais le détail n’écrase la phrase ni la sensation. Les êtres, leurs émotions, les décors dans lesquels ils évoluent ne sont pas convoqués à grand renfort de verbe. C’est ce qui m’a touchée dans ce très joli livre au format si délicat, ce mélange réussi de pudeur et d’intensité, cette manière délicate d’aborder les événements par ses lisières, de ne jamais enfermer l’imaginaire. Le voyage dans une campagne d'ombre et de lumière rythmée par les sabots du compagnon de poil, les dialogues rares mais vrais, tout y respire la vie. Tout, en fermant les yeux et se laissant bercer par les mots lus s'incarne: couleurs, sons, parfums, goûts.
Dans ces descriptions très présentes sous la plume il reste encore de l’espace pour que l’on puisse emprunter les traces des héros et découvrir notre propre Corse derrière eux.
Et l’âne dans tout cela ? Hé bien ce petit âne m‘a rappelé dans son immense courage et ses yeux de douceur les ânes gris d’Afrique qu’aucun travail et aucune charge ne rebutait.
Oui mais cet âne, me direz-vous ?
Lisez ce conte, et découvrez, juste à la fin, le pourquoi de cet âne… et bien d'autres surprises que je ne vous dirai pas.
Lisez ce conte et retournez en enfance, dans le pays où les légendes naissent des réalités et… inversement.
Manfarinu, l'Âne de Noël, aux éditions A fior di carta
20228, Barrettali, Haute-Corse.
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