Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique
Par Viviane Lamarlère
Si elle pouvait te dire et si tu la laissais parler
elle te cracherait que
déjà toute petite
elle ne comprenait pas que tu milites écologique
et brûles tout ça pour aller te bronzer en Asie
Tu dénonçais sans cesse les diktats de la mode
t’abonnais aux revues sans publicité
mais combien de bacs fouillés dans les magasins du samedi
pour trouver la jupe qui ferait pâlir les collègues?
Sur son dos à la moindre mauvaise note
lui cassant à longueur de temps le moral
avec ton désenchantement d'un monde sans rêves
où le chômage l'attendait.
Les sociétés tribales
où les générations vivent encore ensemble
comme tu les enviais
toi qui moquais à longueur de temps tes propres parents!
" Respecte-moi, je suis ta mère !"
Ben non pas obligé... ou alors fais de même!
Elle ne comprenait pas
que tu lui dises d’aller au bout de ce qu’elle fait
alors que tu ne termines jamais tes pots de crèmes
et quand tu revenais en sueur
presque excitée
de tes séances de body-building
à l'âge où elle explosait de boutons de poitrine et de fesses
femme travaillée contre fille égarée
femme étincelle contre flamme rétractée
Si elle pouvait te dire et que tu la laissais parler
elle te dirait que c’était une mère qu’elle voulait
pas une copine attardée
pas une nana de cinquante ans qui se fringue dix-huit pour
séduire ses copains
Tu lui fais peur
Elle ne veut surtout pas te ressembler
pourchassant rides bourrelets tes seins qui tombent
femme passionnée de son travail et qui s'en plaint
si tu savais comme tu lui as fait du mal
un jour où elle était pleine de bonne volonté à t'aider au ménage ou en cuisine
tu n'as même pas attendu qu'elle soit sortie la maison
pour passer derrière elle
La vérification de ce qu'elle tentait de bien faire
la négligence de ce qu'elle ratait
chez quelqu'un qui se prétend libertaire et pour qui
il est interdit d'interdire
ça a tué bien des choses entre vous deux
Femme exemplaire et qui le dis
ayant mené de front comme tu le crois
ta vie professionnelle
et l’éducation de tes gosses
parce que ça
l’éducation de tes gosses
ça la fait rire au milieu de ses larmes
elle aurait préféré des règles " gavé strictes " comme elle dit
mais suivies de tous
et avec logique
Elle aurait voulu jouer avec toi aux dominos
ou au Mémory
que tu lui lises une histoire ou écoutes ses musiques
que tu l'aides aussi à réciter ses leçons
tu l’as abandonnée en compagnie
de Nounou télévision
tonton ordinateur
et parrain Nintendo
Et puis une fois les larmes séchées elle crierait
" Qui me l’a volé l’orange de mon rire ?
qui me l’a volé le pliage de papier
que je voulais te montrer
qui m’a volé ce rayon de soleil ou je tournoyais joyeuse
qui m'a écartelée en me disant
" Fais ce que je te dis pas ce que je te montre!"
qui n'a jamais su me dire NON quand il le fallait?
Maintenant
tu ne peux plus voler sa différence
sur son visage un peu salé
tu lis les quais laquais
leur échine plongeant dans les ports où tu vagues
Mère
essaies enfin d’entendre son visage
une petite ruine
qui va de ses pensées à ce qu'il n' ose dire:
" Assieds-toi là que je t’écoute
ouvre-moi ton regard
que je m’appuie un peu "
Giordano : La Mamma e morta par Maria Callas
Chic salon © - Hébergé par Overblog