Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique

Bateau caniveau




Ce petit bateau
né du caniveau

je monterai dessus

et partirai si loin

qu’on pourra en chameau

en avion en oiseau

me chercher en tous lieux on ne trouvera plus

rien

Ecartée la buée qui nimbe le limpide

et si changeant reflet de  mon eau canivelle

écartée la cruelle

boue savonneuse qui de ses glouglous imbibe

le  flanc de la ruelle

Je vois déjà au fond

des reflets de vanille

la queue de tigres ronds

et les yeux d’un nabab jouant à la manille

il tient entre ses doigts des iles pittoresques

Que j'aimerais pouvoir d’une seule arabesque

lui dérober son jeu et gagner l’impossible

Absinthée l’eau croupie,

et pourtant

son  ivresse me prend

et me tourne le cœur comme on lance roupie

au charmeur de serpent

Les bois, les arbres, nom ! Que de beautés à vivre

palissandre, caca, ébène ou  acajou

de senteurs oubliées qui approchent ma joue

flottant sur ce radeau incongru comme un livre

écrit hors du langage

Ma bouche est en voyage

dans les transes du vert

céladon

et lentisques

au cœur desquelles nage à péril et xotique

un tragique espadon

qui n’a pas vu mes rets à son exode ouverts

Ah, tiens, une babouche suit mon batelet

et puis un vieux bouchon au trottoir qui se cale

J’ai valse hésitation entre ces trois secrets

emplis de vérités aux candides escales

Murmurez-moi lequel

je les aime tous trois

mes frêles caravelles

et n’ose faire un choix…

Mais déjà ce creuset s’imagine grand fleuve

lisant en paresseux les rives allongées

les accents circonflexes de mouettes aux cris de veuves

trouent les euh pudibonds des nuages dérangés

dans leur travail de scribe

Au creux du caniveau, je m’en vais

voyager.


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