Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique
Pour le plaisir de traiter les uns après les autres tous les sujets du bac Philosophique, toutes sections confondues et renouer ainsi avec un chemin d'écriture différent mais aimé...
Galilée. Poète ? On pourrait croire en première instance que l'imagination est l'ennemie de la science et pourtant... Cette "maîtresse d'erreur" comme le disait Pascal, cette faculté de se représenter ce qui est absent et même n'existe pas, à user de la métaphore pour donner à entrevoir des mondes fictifs fut l'un des moteurs de la science. S'arrachant aux limites des connaissances de son temps, Galilée supposa le monde comme un grand livre écrit en langue mathématiques. Un siècle plus tôt, Copernic imaginant que la terre tournait autour du soleil avait lui aussi fait un pari sur l'avenir qui lui donnerait raison. Son hypothèse et les travaux de Galilée puis de Newton ne seraient prouvés que quelques siècles plus tard par Foucault et son célèbre pendule.
Le questionnement des causes du réel est inhérent à la nature humaine. Si longtemps les réponses données furent poétiques, religieuses ou farfelues, le chercheur ne s'en remet plus au hasard. Il formule une hypothèse et en prouve la validité ou l'erreur à travers un travail méthodique et protocolaire. Ainsi progressa la connaissance en général et la science en particulier. Mais qu'est au juste une hypothèse? Son étymologie suggère ce qui se situe en dessous de la thèse. Ce qui lui sert de fondement mais aussi ce qui lui est qualitativement inférieur. Demander si l'on peut prouver une hypothèse scientifique suggère tout à la fois qu'il s'agit d'un acte de la plus haute importance et que l'on pourrait n'en avoir ni les capacités, ni le droit, ni la possibilité. Que au bout du compte, ce serait entreprise vaine. Questionnons la question.
Qu'est ce que la science et quelle relation entretient elle avec l'hypothèse?
Longtemps la connaissance fut réunie en quelques gros ouvrages par quelques grands hommes avec pour souci de ne point en morceler les différents domaines. On pourrait citer Aristote et Descartes qui réfléchirent tous deux à une méthode propre à la science. Nos temps modernes et positivistes ont éclaté ce souci d'unité accessible à l'entendement humain en parcelles de plus en plus petites et qui sont objets de recherches, hypothèses, découvertes et surtout spécialisation du savoir.
Chacun est capable de ranger dans deux catégories différentes d'un côté la biologie, les mathématiques, la physique, par exemple, et de l'autre l'alchimie ou l'astrologie.
Le critère premier de cette reconnaissance de la science comme telle et par opposition à ce qui ne le sera jamais est la puissance d'action des sciences sur le monde matériel et vivant (on pense au vaccin contre la rage ou à la machine à vapeur)
Néanmoins la science est bien plus un savoir qu'un faire, qui appartient au domaine des techniques.
La connaissance scientifique se donne pour projet de comprendre les causes des faits observés. Pour cela, elle pose des hypothèses, les teste de manière répétitive et protocolaire par l'expérimentation, puis fournit une explication concordant avec la logique des procédures. Faire progresser tel ou tel domaine du savoir conduisit d'ailleurs, souvent, à rompre avec les hypothèses et thèses précédentes. Ce que Bachelard appelait la philosophie du non.
L'hypothèse ne nait que s'il y a un fait à expliquer. Elle est un fécond viatique sans lequel il n'y aurait que magie et enfances.
Mais le tryptique observation, hypothèse vérification expérimentale ne s'applique pas à toutes les sciences.
Les sciences expérimentales étudient la matière vivante ou inerte. Leurs objets sont connaissables de manière empirique avant que l'observateur en extraie puis synthétise sous forme de thèse les données universelles de leurs propriétés.
Les sciences pures comme la logique ou les mathématiques construisent leur objet et procèdent par démonstrations cohérente aboutissant à des théories ou théorèmes.
Les sciences humaines, dans la mesure où les faits observables sont difficilement reproductibles et restent du domaine de l'interprétation se passent de vérification expérimentale au sens strict.
Pensons pour exemple à l'hypothèse de l'existence de l 'inconscient selon Freud. Cette hypothèse n'a jamais été prouvée, elle ne fait donc pas de la psychanalyse une science mais un art ou une technique. Dont on peut d'ailleurs sur le seul plan de la réussite thérapeutique discuter de l'efficacité.
On voit donc que prouver une hypothèse s'applique uniquement aux sciences expérimentales.
Ceci nous amène à la seconde question: Qu'est ce qu'une preuve scientifique?
La preuve est selon le dictionnaire un fait, témoignage, raisonnement susceptible d'établir de manière irréfutable la vérité ou la réalité de quelque chose. On sait à quel points les témoignages peuvent être subjectifs et les raisonnements placés sous des prémisses fausses. Il reste les faits et leurs causes dont il faut apporter la preuve. La définition de la preuve est donc d'une grande complexité. Le mot lui même vient du latin proba: échantillon, essai. Il est à rapprocher du mot probité: honnêteté.
La preuve est étymologiquement un essai de définition du réel, un échantillon, une partie du tout. Elle n'est pas tout le réel, elle n'est pas tout le Tout. Elle n'est pas la vérité mais elle s'en approche, lui donne probabilité. L'étymologie d'emblée classe la preuve comme élément provisoire de la lecture du réel et de sa compréhension.
Quelle est donc l'utilité de la preuve si le réel ne peut pas être entendu dans sa totalité ?
Pourquoi continuer de formuler des hypothèses si on sait que les preuves que l'on y apportera ne peuvent être que provisoires et conjointes à l'avancement de la technologie et des moyens que se donne la science à un moment donné de son histoire? Et doit on, en conséquence, prouver les hypothèses que l'on avance?
L'hypothèse avant qu'elle ne soit prouvée, pendant qu'on en apporte la preuve ou la réfutation et après qu'elle ait été validée ou invalidée, est en chacun de ces trois moments dynamiques utile à l'ouverture de champs nouveaux pour l'intelligence, l'expérience, la connaissance du monde qui nous entoure. Elle permet de conquérir de manière progressive les secrets de la nature et de susciter des réponses techniques aux besoins du vivant. Elle apporte une réponse provisoire à l'étonnement. Elle est un outil temporaire dans cette conquête.
Les qualités requises à une bonne hypothèse sont la simplicité de l'énonciation, la vraisemblance et la facilité qu'elle laisse à la reproduction artificielle et en série du phénomène étudié. Comme le disait Hume, " Une hypothèse extraordinaire demande des preuves extraordinaires".
Mais à elle seule, l'hypothèse n'est rien sans le raisonnement et le travail d'expérimentation répété, méthodique, admissible et reproductible par tous dans les mêmes conditions. qui la suivent, la valident ou la contredisent.
Maintenant, pour répondre à la question initiale, peut-on prouver une hypothèse scientifique?
Nous avons dit précédemment que l'hypothèse devait posséder comme qualité celle de la vraisemblance. Pourtant des hypothèses tenues pour farfelues hier et qui auraient valu à leur auteur tel Giordano Bruno d'être brûlé ou cloué au pilori sont aujourd'hui admises de tous. Tout simplement parce que ces hypothèses ont fini par trouver le cadre technologique, intellectuel, sociétal qui leur a permis d'être enfin validées, qui pour reprendre un mot de K. Popper, en a corroboré les différents niveaux, et plus précisément" s'est accordé sur l'erreur ". Prouver, c'est en effet accepter que l'hypothèse franchisse des tests complexes afin d'éliminer des erreurs de formulation, que le protocole expérimental ne soit pas adapté et qu'il faille en trouver un autre, voire que l'hypothèse débouche sur... rien.
On ne peut donc prouver une hypothèse scientifique que de manière temporaire et dans un contexte donné qui la rend recevable. Rapprochons d'ailleurs le mot preuve du mot probité, sans doute la même étymologie latine ( proba, probus). La question qui nous était posée prend alors tout sons sens. Si on est honnête, on est obligé d'admettre qu'une hypothèse scientifique ne vaut que pour un moment de l'histoire des sciences qui un jour ou l'autre la rend caduque. Une hypothèse scientifique ne pourrait être prouvée définitivement et donc accéder au statut de thèse ou de vérité définitive définissant un objet du réel que si plus aucune démarche scientifique quelle qu'elle soit ne pouvait la contredire.
L'histoire des sciences nous montre que c'est à petits pas que l'homme a conquis du terrain sur l'univers infini de l'inconnu. Par alternance d'essais et erreurs, et sachant que rien n'est définitivement acquis.