Poésie, symbolique du monde, les quatre éléments, contes, écoute, accompagnement, musique
Par Viviane Lamarlère
Au pied du mont Fébé les pierres ont des histoires
plein les cristaux. Le soir,
quand la forêt se tait et que les lianes rangent les jeux de la journée dont quelques rares franges traînent encore au sol,
les cailloux tout en rond
s’asseyent. Balafon
et djembé sont en route
Ecoute…
Voilà ce que la pierre du jour où frappait le soleil m’a raconté…
Il était une fois
le début du monde et le début des gens et les débuts de l'ombre
Aux débuts de toute histoire tout va toujours très bien
c’est ensuite que l’usure aux oreilles rongées a besoin qu’on lui dise les choses de manière plus précise
à chaque fois plus précise.
Il était une fois un village de Kek-Par où les hommes mouraient à l’âge où l’on doit mourir
et parfois pas
et des questions coulaient d’une bouche à l’oreille voisine
des questions telles que " Et tu crois qu’après et tu penses que pendant et tu sais qu’ avant
tu te souviens comment..."
On en oubliait le QUI venait de partir là bas
Cela bruissait tant
que Dieu le très attentionné
le Bienveillant à la tranquillité de sa sieste
dépêcha sur la terre deux animaux.
Le premier s’appelait Caméléon
le second
Lézard
« Allez mes deux courtes pattes ! allez et distribuez la bonne parole aux hommes, toi Lézard tu diras à ces bêtes que la mort est sans retour et toi Caméléon tu leur diras qu’il y a une vie après la mort.
Allez, le premier qui aura transmis cela aux hommes leur aura dit la vérité pour toujours et les décrêts d'application
en découleront
immédiatement
et revenez moi. »
Ainsi fut fait...
Planant sur les nuages ils atterrirent tous deux au pied du mont Fébé.
-Il faut chercher les hommes dit Caméléon, je ne sais même pas à quoi ils ressemblent !
-Ce sont des sortes de bêtes qui ont une grande jambe brune et des tas d’yeux verts qui poussent au bout avec parfois des yeux d’autres couleurs qui s’ouvrent le matin ou se ferment le soir et inversement, il fait frais tout en haut de leur tête et il court des bruits pointus ou rauques entre leur front et leur nez
-Tu veux dire des éternuements?
-Pas vraiment pas vraiment, non, un éternuement cela retrousse les yeux des hommes et pince leur nez,présentement il s'agit de parlers mélodieux… mais au fait je me demande pourquoi je t’aide ! Parce que nous sommes censés nous disputer une vict...
Il n’avait pas fini sa phrase que Caméléon était déjà en train d’expliquer l’éternité à toute la forêt.
Prenant son temps, Lézard alla d'un quatre-pas tranquille voir le chef du Village de Kek-Par.
-Homme, assieds-toi et prends ta tête dans tes mains pour éviter qu'elle ne roule au sol et poussière tes cheveux, j’ai une nouvelle désagréable à t’annoncer. Il n’y a rien après la mort, c’est un passage sans retour. Désolé…
-Qui es-tu pour venir troubler nos espérances ?
-Je suis Lézard, l’envoyé de Dieu le conciliant.
-Envoyé de Dieu ? Toi? Si petit si chétif si malingre rahhhhhhhhh.... Tu ne mérites pas que je t'écoute mais comme cela fait longtemps que nous n'avons pas reçu ici de quoi rire un peu, attends...
Et le chef du village de se retourner en enroulant ses mains autour de sa bouche:
"Hé mes amis ! venez voir l’envoyé de Dieu, venez voir, il me dit qu’il n’y a pas de vie après la mort !"
Le village accourut aux nouvelles
commença par rire de bon cœur
rire à en pleurer de joie
puis fut pris d’une panique soudaine et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire
des statues de terre furent modelées
des temples érigés
des prières apprises par coeur
pour renverser le mauvais sort
la peur distribuée inéquitablement.
Lézard qui savait que c’était la vérité vraie regardait au loin Caméléon, contrit de s’être laisser berner, se cacher du mieux qu’il pouvait dans les branches d’un arbre et se transformer à volonté en fleur, en pince à linge ou en feuille de banian pour échapper aux foudres de Dieu le Bien-veillant.
Puis
comme c’était la vérité
et que cette loi s’appliquait désormais à sa petite toute petite personne
il trouva un vieux mur
où le soleil tapait bien fort à en éclater ses gouttes
et décida que sa vie se limiterait à une seule chose
dormir d’un œil
avant de dormir de l’autre
Pendant ce temps
les hommes s’agitent
et Dieu se repose...
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