Le motet est lui aussi d'origine religieuse mais chanté uniquement à la fin des offices. Il y commente avec des paroles tout à fait originales les textes musicaux liturgiques traditionnels d'ordinaire dévolus à la voix qui " tenait " la mélodie ( teneur ou ténor)
Bientôt, il s'emparera de thèmes amoureux, politiques, satiriques, voire anticléricaux, et sera donc chanté en dehors de l'Eglise à l'intention de milieux lettrés tels que ceux des étudiants, médecins et savants. Très rapidement d'ailleurs apparaîtront des motets pluritextuels, chacune des voix chantant un texte différent.
Enfin le conduit, qui est un genre majeur dans l'école de Notre-Dame, par son allure très solennelle. D'abord d'inspiration religieuse mais non liturgique, il ne puise pas dans le répertoire connu mais crée des oeuvres aux mélodies et textes tout à fait originaux qui sont à l'origine du drame liturgique donné sur les parvis des cathédrales. Il accompagne les processions durant l'office et se répand peu à peu lui aussi hors de l'édifice. Guillaume de Machaut, dont je vous reparlerai, n'est pas loin.
Deux compositeurs se détachent en ces temps de grande puissance créatrice à laquelle le peuple entier participe avec ferveur. Ils vont servir le besoin de faste de l'Eglise et de la Royauté.
Le premier est Léonin ( 1150-1210 ) qui fut le maître de chant et de musique fondateur de cette école dite de Notre-Dame. Ses chants à deux voix sont richement ornées et c'est lui qui organise en un seul ouvrage, le Magnus Liber Organi de gradali et antiphonario, soit Grand livre d'organum pour le graduel et l'antiphonaire, les répons et plain-chants grégoriens. De ce livre maintes fois recopié et diffusé dans toute l'Europe ne restent que des copies partielles au Vatican et en différentes bibliothèques européennes.
Le second est Pérotin ( 1160-1230) .
Il va remanier le Magnus Liber de Léonin, libérer les voix de leur carcan formel, l'accompagnement va utiliser les croisements de voix en sus des notes tenues. Ce que l'on nomme la voix " organale " ( qui accompagne) prend le nom de contra-cantus, contrechant. Au lieu de se situer à la basse, elle va monter dans l'aigu. Et surtout Pérotin va inventer le mouvement contraire des voix, ce qui lui offrira de plus grandes libertés modulatrices.
Voici une page de conduit de l'époque de Pérotin ( Bibliothèque numérique de la faculté de Montpellier)
Deux pièces pour terminer cette courte page consacrée à l'Ars Antiqua. Cette musique est austère, peut-être plus austère encore que le chant Grégorien que nous connaissons mieux aujourd'hui que la musique de cette période laissée à l'oubli. Comme toutes les oeuvres des périodes de transition, elle porte en germe les génies à venir... Léonin
Et Valde
On entend parfaitement la voix accompagnante dans cet air et elle chante dans l'aigu, alors que les voix dites solistes résonnent à la basse.
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